
Hauts potentiels intellectuels, précoces, sur-efficients, besoins intellectuels particuliers, zèbres, intelligences atypiques, caméléons, etc. La liste est longue des qualificatifs imaginés par les spécialistes, souvent pour éviter par pudeur le terme perçu comme trop élitiste de surdoué. Certains ont aussi créé les substantifs improbables de « douance » ou même « surdouance ». Toutes ces appellations désignent des personnes ayant des capacités intellectuelles nettement au-dessus de la moyenne, quand on les mesure avec le test du QI qui est la référence universelle dans ce domaine. Vous êtes considéré comme surdoué si votre QI est supérieur à 130, ce qui s’applique théoriquement à 2,2 % de la population. Le terme est surtout utilisé pour les enfants, considérés comme « précoces » s’ils ont des performances intellectuelles d’enfants plus âgés. Il est de plus en plus utilisé chez les adultes, en estimant qu’un enfant précoce peut devenir un adulte surdoué, ce qui peut être le cas mais pas toujours.
Cette caractéristique pourrait apparaître, à première vue, plutôt comme un avantage, dont il serait un peu dommage de se plaindre. Pourtant, certains surdoués vivent très mal leur condition et semblent en souffrance du fait même de leur intelligence. D’abord car un QI élevé provoque un décalage avec la majorité des autres personnes, dites normales. On comprend très vite les choses, on s’ennuie à l’école, les autres ont du mal à vous suivre, et on se retrouve un peu tout seul. Des « problèmes de riches » diraient certains, car il suffirait d’utiliser son intelligence pour se mettre au niveau des autres. Pas si simple, car ces personnes semblent avoir fréquemment aussi des particularités mentales qui ne sont pas uniquement quantitatives (QI élevé), mais aussi qualitatives. Il s’agit surtout d’une hypersensibilité émotionnelle, d’une intuition forte et éventuellement douloureuse, d’une empathie excessive aux difficultés des autres, et même d’un mode de pensée différent. On parle par exemple de pensée en « arborescence » ou « divergente », une idée en appelant une autre très rapidement, comme un feu d’artifice, donc difficile à canaliser. Les surdoués ont aussi souvent l’impression d’être trop lucides sur le monde, d’en voir tous les défauts et de ne pouvoir ainsi accéder au bonheur.
Même s’il faut se méfier des excès et des diagnostics posés un peu trop vite, la reconnaissance de particularités cognitives de certaines personnes est une bonne chose pour les aider à mieux gérer leur différence. En cas de doute, un bilan général chez un psychiatre ou un psychologue est une bonne solution, mais ce bilan ne doit pas se limiter à un test de QI, il doit comprendre une évaluation plus complète.
Les solutions reposent sur des méthodes d’apprentissage et sur des prises en charge spécifiques, avec des classes ou même des écoles créées pour les enfants ayant des « besoins intellectuels particuliers ». Chez l’adulte aussi, une aide psychologique basée sur l’estime de soi, la gestion des émotions et une aide à la socialisation peut être bénéfique. Il existe des clubs ou des associations spécifiques où les surdoués se retrouvent entre eux, mais avec le risque d’un fonctionnement cloisonné qui s’éloigne encore un peu plus de la société des « normo-pensants ».
Article adapté d'un chapitre du livre "Retrouver l'espoir. Abécédaire de psychiatrie positive" d' A. Pelissolo (Odile Jacob).